L’Eglise évangélique du Congo (EEC), via le projet basé sur le genre, a proposé une série de photos illustrant les différentes formes de violences faites aux femmes lors d’une exposition organisée par l’Union européenne le 8 mars à l’Institut Français du Congo. Passi Bibéné, responsable de l’animation et la formation du projet basé sur le genre à l’EEC, nous donne plus de détails à ce sujet.
Les Dépêches du Bassin du Congo : Comment est née l’idée de cette exposition ?
Passi Bibéné (P.B) : L’idée de réaliser une exposition ne vient pas de nous, mais nous avons été associés par l’Institut français du Congo ainsi qu’à d’autres partenaires, qui ont eu vent de ce que l’EEC accomplissait dans le cadre des violences faites aux femmes.
LDBC : Quelles sont vont attentes à la suite de cette exposition ?
P.B : Cette vitrine nous permet de non seulement dévoiler les différentes formes de violences qui existent au sein de l’EEC, dans la société congolaise, mais aussi de dénoncer et surtout d’interpeller les Eglises à briser le silence vu que les violences basées sur le genre existent bel et bien au sein des Eglises. Et renier cela ne fera qu’aggraver la situation. Nous voulons donc qu’à travers cette exposition, qui est comme une sorte de campagne de sensibilisation, conscientiser la population sur les différentes formes de violences à l’égard des femmes.
LDBC: On connait l’EEC assez conservatrice quant à l’évocation de certains sujets. Qu’est ce qui a poussé les responsables de l’EEC à mettre en marche ce projet sur les violences faites aux femmes ?
P.B : Mise en place entre 2011 et 2012 par les responsables de l’Eglise, la question centrale était de savoir si au sein de l’EEC les violences (est ce que les hommes battaient leurs femmes, est ce qu’il y avait des viols, des femmes harcelées …) faites aux femmes existaient. Autour de ces interrogations, l’Eglise a voulu mener une enquête dans trois paroisses pour vérifier si les questions posées se confirmaient. Et malheureusement les réponses qui ont été obtenues confirmaient effectivement l’existence des violences à l’égard des femmes au sein de l’EEC, par les membres de l’EEC. Et c’est à partir de ce moment que l’EEC, en partenariat avec l’Eglise de Norvège, s’est engagée à lancer un projet pilote en 2013 qui a duré trois ans, où il était question de mettre en place une structure de protection et de défense contre les violences faites aux femmes à l’Eglise.
LDBC : Quels ont été les résultats de cette enquête ?
P.B : Les résultats ont été satisfaisants, puisque cela a encouragé les deux Eglises (de Norvège et du Congo) à poursuivre la même action avec, cette fois-ci, une portée plus large puisqu’elle s’étendait sur le plan national. Le projet a débuté en 2016 et s’intitulait « Projet violence basé sur le genre au sein de l’EEC». Après ce projet, l’église a voulu s’inscrire dans le cadre de la pérennisation de l’action de lutte contre les violences basées sur le genre, et ce qui a emmené l’église a élaboré en 2017 une politique qui est actuellement mise en œuvre et va s’étaler jusqu’en 2022 dans le cadre de la lutte basée sur le genre.
LDBC : Quand on parle de violence, cela ne concerne pas seulement les violences sexuelles. Aujourd’hui avec ce vent, est-ce qu’on trouve de plus en plus de femmes pasteurs quand on sait que dans le passé des idées machistes retardaient l’ascension des femmes à ces fonctions alors que ’elles avaient des dispositions ?
P.B : La situation est en train d’évoluer. Aujourd’hui, on a beaucoup de femmes dans le corps ecclésiastique. De plus on trouve depuis 2016, trois femmes ecclésiastiques qui occupent les postes de coordonnatrices, chose qui était encore impossible il y a peu. Malheureusement à ce jour, il y a une petite régression car après le synode, nous sommes passés de trois à une coordonnatrice qui est responsable du consistoire de Pointe-Noire1. Heureusement que dans d’autres départements, les femmes sont présentes. C’est le cas au niveau du département synodal de l’évangélisation chrétienne, au département synodal dit Femme et famille et plusieurs autres interviennent à la faculté théologique de Mantimou au titre d’enseignantes et sont également membres du rectorat. Ce sont des acquis qui demeurent à mon sens, et là je parle en tant que laïque, insignifiants par rapport au poids que la femme représente dans l’EEC, car lorsque nous faisons des recensements, en termes de fidèles et de membres actifs, les femmes sont beaucoup plus nombreuses, beaucoup plus représentatives que les hommes en tant que membre de l’Eglise.
LDBC : Les nombreux efforts consentis pour responsabiliser les femmes au sein de l’EEC demeurent insignifiants comme vous l’avez souligné plus haut. Comment aujourd’hui comptez-vous améliorer cela ?
P.B : Je pense que l’Eglise va procéder à des sensibilisations, pour qu’au sein de l’EEC la femme soit considérée au même titre que l’homme. Et donc le travail de sensibilisation est plus qu’urgent et au niveau de l’Eglise on n’aime parfois parler d’une nouvelle articulation de l’évangélisation qui va consister à revaloriser le ministère de la femme, cela montre que l’Eglise s’inscrit dans une nouvelle dynamique où la femme aura une place de choix au sein de l’EEC.