À l’issue d’un voyage à la découverte du Congo, zoom sur quatre jeunes de banlieue parisienne désireux de tordre le cou aux idées reçues à propos de leur pays d’origine. Décryptage sur leurs intentions d’après séjour, avec, en première ligne, Fred Moutsita et Yoan Luntadila, l'initiateur.
De l’avis des sociologues et des Congolais de France, il est établi que les enfants nés en France de parents d’origine d’Afrique subsaharienne se trouvent inévitablement tiraillés entre deux générations. Ils vivent en permanence la dualité entre le devoir moral de l’amour du pays d’origine reçu des parents et le sentiment d’appartenance à la patrie d’accueil, cultivée par une éducation appropriée.
Au travers de nombreux récits de leurs parents de retour de villégiature au Congo, notamment des conditions de vie, se dessine une impression proche du désamour de leur pays, au point que leur constat les porte à un engagement supplémentaire dans le processus d’installation durable en France. À les entendre, cela se résume très souvent en ces termes : « Rien à faire au Congo ! Vous, les enfants, votre place, c’est ici en France et non au Congo ». Et pourtant, ils maintiennent un fort attachement au pays d’origine vis-à-vis duquel ils ont toujours un projet de retour définitif qui, dans les faits, est sans cesse reporté et ils se limitent à des séjours temporaires.
Lassés d’entendre ce discours récurrent, Fred Moutsita, Stemer Mouk, Yoan Luntadila et sa copine antillaise Cassy ont décidé de partir sur place au Congo, pour côtoyer les populations et se rendre compte par eux-mêmes des réalités congolaises. Ainsi, ils s’y sont rendus quelques jours, fin juin-début août, leur motivation première consistant à établir un pont entre le pays d’accueil et le Congo.
De ce fait, pour leur premier voyage au Congo, ils ont eu à cœur de se documenter sur l’histoire de leur pays d’origine, remontant à la période de l’esclavage, en passant par la colonisation, les années de la décolonisation, jusqu’à la mondialisation. Ils ont même entrepris l’apprentissage des langues Kikongo et lingala et se sont enquis des us et coutumes de base au Congo.
« Pour nous, se rendre au Congo a été un projet bien mûri », confie Yoan. Et d’expliquer : « nous avons tenu à sortir de la double référence de la France en matière de pratiques, de valeurs, de normes ou de principes éducatifs en nous débrouillant tout seuls, sans les parents. Nous nous sommes organisés en finançant les billets et les frais de séjour nous-mêmes, après avoir effectué préalablement des petits boulots».
« Sur place, sans vouloir montrer de signes ostentatoires indiquant notre provenance, nous avons, durant notre séjour, observé, enquêté et dégagé les axes à explorer pour « là-bas » et pour notre quotidien ici en France ; assurément, nous avons été façonnés pour une installation durable en France, mais nous possédons néanmoins des liens affectifs et matériels pour les deux pays».
Au-delà du soutien familial classique, grâce à une ferme envie commune et à leur dynamique entrepreneuriale, ils envisagent d’investir et ils ont retenu plusieurs projets à réaliser au Congo. « Avec nos parents, la réussite d’une vie d’immigrés se mesurait plus à l’aide apportée à la famille restée au pays. Nous voulons mettre en place des pratiques différentes, donner une plus grande place à l’entreprise et à l’investissement privé, réaliser des projets en lien avec le développement durable impliquant la jeunesse», explique l’initiateur du séjour au Congo.
De retour en France, l’équipe des quatre amis a constaté les réalités tant positives que négatives dans un pays possédant de richesses naturelles à travers un paysage extraordinaire. En revanche, certaines constructions immobilières présentent des défaillances et souffrent de l’effet de l’obsolescence.
Pour toutes ces raisons, ils ont retenu en priorité le projet de « pied-à-terre » en rapport avec la conception de maisons en ossature adaptable avec l’écosystème environnemental dans un nouveau quartier à la périphérie de Brazzaville. Celles-ci permettront de loger une diversité de la population congolaise et les membres de la diaspora de retour au Congo. À ce projet s’ajoutera parallèlement le traitement des eaux usées pour lutter contre la prolifération de moustiques, vecteur du paludisme.
L’optimisme des quatre promoteurs leur souffle même de prévoir la formation des jeunes marginalisés aux métiers relatifs au bâtiment et au développement durable durant le chantier de construction précité.