L'association Conscience républicaine (CR) a organisé, le 5 mars dernier, un déjeuner-débat sur la situation des langues maternelles au Congo. Une rencontre visant à mieux cerner la problématique tout en rappelant le rôle de ces langues et leur importance.
Placé sur le thème « Qu’en est-il des langues maternelles en République du Congo ? », le moment de partage d’idées s’est inscrit dans le cadre du lancement de la première édition des petits déjeuners-débats de la CR. Selon les organisateurs, ces déjeuners-débats sont un format de manifestation donnant la priorité à des discussions libres autour d’un thème, différent à chaque fois.
Ouvrant le déjeuner-débat, le président de l’association CR, Yvon Eddy Steeve Mougany, a souligné que l’intérêt du thème choisi est de mettre en avant toute la problématique sur les langues maternelles qui sont la base même de l’identité et de la culture congolaises. D’après lui, la diversité linguistique au Congo est une véritable richesse, qui représente un potentiel pouvant maximiser la créativité et les compétences congolaises dans les activités de développement. « Les langues ne sont pas seulement des structures linguistiques sophistiquées qui permettent de communiquer. Elles sont le vecteur de cultures, de valeurs et de savoirs, d’un patrimoine ancestral, de traditions orales, d’une mémoire collective, de l’histoire d’un peuple », a-t-il dit.
En effet, la session d’échanges s’est articulée autour de plusieurs sous-thèmes, notamment « Langue, culture et développement au Congo » ; « Auto-aliénation linguistique des élites congolaises » ; « Transmission générationnelle des langues au Congo ». Abordant le premier sous-thème, le professeur et anthropologue Auguste Miabeto a indiqué que pour aboutir à un développement qui prend appui sur la culture, il est important de créer des sociétés de la connaissance ; des académies de la langue ; d’instituer des journées de culture nationale ; de faire la mise à jour des savoirs anciens.
« La langue n’est pas qu’un simple moyen de communication mais plutôt un élément essentiel d’une culture… Une communauté sans culture est morte. On ne peut prétendre à un développement sans culture. La langue est donc la boîte noire de la société car elle est l’expression de toute l’intelligence d’un peuple ainsi qu’un pont d’appui au développement », a-t-il fait savoir.
S’agissant du troisième sous-thème, le professeur et linguiste Frydh Ondelé a évoqué les facteurs de progression et de régression des langues vernaculaires. A ce propos, il a signifié que la politique linguistique nationale est notée faible pour la sauvegarde de ces différentes langues : l’Etat devrait établir une politique linguistique en faveur de ces langues ; les communautés de locuteurs doivent les parler sans-gêne ni complexe et les transmettre de génération en génération ; les linguistiques doivent se mobiliser pour la description de ces langues, la conception d’ouvrages et de dictionnaires.
« Le changement de politique linguistique nationale est une nécessité, les mesures de sauvegarde des langues locales doivent être prises et appliquées car elles sont des marques de notre identité, des véhicules, des transmissions et de pérennisation de nos cultures. Avec une diversité linguistique de soixante langues, la conservation et le maintien de ces dernières sont une richesse car ces langues véhiculent les cultures congolaises et la diversité culturelle est une condition nécessaire pour le développement humain », a-t-il déclaré.
Au terme de la rencontre, Yvon Eddy Steeve Mougany a précisé que les différentes propositions faites lors de ce déjeuner-débat seront rassemblées afin d’élaborer un plaidoyer destiné aux décideurs pour des actions fortes en faveur des langues maternelles.
Regroupant hommes et femmes, l’association CR est un laboratoire d'idées dont le but est d’identifier et de fédérer les talents pouvant contribuer à la réflexion, accroître la connaissance sur les thématiques abordées et enfin sensibiliser à la culture citoyenne et au civisme.