Dans la culture kongo, au Sud de Brazzaville, il y a des pierres qui ne sont jamais de simples éléments du décor. Certaines sont silencieuses, mais chargées d’une force mystérieuse. On les appelle ''ntotila'',''nkisi'' ou encore "pierre des ancêtre". Elles sont cachées, parfois bien visibles et jouent un rôle central dans la vie spirituelle et sociale des communautés kongo.
À première vue, les pierres dont il est question n’ont rien de particulier : une forme brute, parfois arrondie, parfois dressée comme une stèle, sans inscription ni décoration apparente. Mais elles sont considérées comme les gardiennes des traditions et les relais des ancêtres. Elles ont une âme, une voix, et surtout une mémoire.
Des pierres pour gouverner, protéger, juger
Chez les Kongo, on ne devient pas chef traditionnel (Mfumu) sans passer devant la pierre. Lors de la cérémonie d’intronisation, le futur chef pose sa main sur une pierre consacrée, placée au centre d’un bois sacré ou près du sanctuaire familial. Ce geste simple scelle un serment : celui de respecter les lois des aïeux, de protéger son peuple et de gouverner avec justice. La pierre devient alors le témoin silencieux de cet engagement. Elle ne parle pas… mais elle se souvient.
Les pierres ne sont pas seulement associées au pouvoir. Elles protègent aussi les villages. Certaines sont enterrées à l’entrée des communautés pour repousser les mauvais esprits, d’autres sont utilisées pour appeler la pluie en période de sécheresse, ou pour rétablir l’ordre en cas de conflit familial. Elles servent parfois à la divination, entre les mains des "nganga", les prêtres-guérisseurs.
Des objets à ne pas toucher à la légère
Manipuler ces pierres n’est pas donné à tout le monde. Leur puissance est redoutée, et leur usage strictement encadré par les règles ancestrales. Ce sont les initiés, les anciens ou les gardiens de la tradition qui en détiennent les secrets. Un geste maladroit, un manque de respect et l’on s’expose à des conséquences spirituelles parfois graves, dit-on dans les villages.
Un patrimoine spirituel méconnu
Aujourd’hui, à l’heure où les traditions orales se perdent, ces pierres continuent de survivre dans certaines familles et dans des villages où la coutume reste vivace. Elles ne font pas l’objet d’exposition dans les musées, et leur pouvoir n’est pas toujours compris par les jeunes générations. Pourtant, elles constituent un héritage précieux de la spiritualité africaine. Elles rappellent que dans la culture kongo, la terre est vivante, la parole est sacrée… et même une pierre peut parler.