Économie informelle : femmes, piliers de l’économie des quartiers populaires

Jeudi, Juin 12, 2025 - 18:19

Solidaires, médiatrices sociales ; dans l’ombre, elles assurent l’essentiel malgré la précarité.

Dans les quartiers populaires de Brazzaville, les femmes jouent un rôle central pour le maintien de la vie économique, sociale et familiale. Malgré la précarité, elles tiennent des foyers souvent fragilisés, assurent une large part de l’économie informelle et participent activement à la cohésion des communautés. Un engagement quotidien, rarement reconnu à sa juste valeur.

À Mfilou, Gemima, 37 ans, élève seule ses trois enfants. Depuis que son mari a perdu son emploi, elle assure les dépenses du foyer grâce à la vente de tomates fraîches. « Je me lève à 4 heures du matin pour aller m’approvisionner au marché Total. Je dois payer le loyer, l’école, la nourriture. C’est difficile », témoigne-t-elle.

Comme elle, de nombreuses femmes dans les arrondissements périphériques – Mfilou, Ouenzé, Makélékélé – évoluent dans l’économie informelle. Vente de produits alimentaires, coiffure à domicile, restauration de rue : ces activités, souvent non déclarées, représentent leur seul revenu. Les journées sont longues, les bénéfices incertains et la protection sociale inexistante.

Ladie, 32 ans, alterne entre coiffure et vente d’arachides. « Certains jours, je gagne 3 000 ou 5 000 francs CFA, d’autres joours rien. Mais les enfants doivent manger, quoi qu’il arrive », déclare-t-elle.

Double journée, triple charge

À cette pression économique s’ajoute la gestion quasi exclusive du foyer. Éducation des enfants, tâches ménagères, soins aux proches : les responsabilités sont multiples, souvent assumées seules. Cette surcharge mentale et physique, structurelle, reste largement invisibilisée. Certaines femmes doivent en plus affronter des violences domestiques. Diane, 39 ans, a quitté son domicile avec ses cinq enfants après plusieurs années de maltraitance. « Il m’interdisait de sortir, il avait pris une autre femme, et m’a laissée avec les enfants. Aujourd’hui, je vis chez ma sœur. J’essaie de me reconstruire », explique-t-elle.

Face à ces défis, certaines femmes se regroupent. Des associations locales proposent des formations en couture, coiffure ou gestion de microentreprise, pour favoriser l’autonomisation économique. Les organisations nin gouvernementales apportent un soutien, mais leurs moyens restent limités et ne couvrent qu’une petite partie des besoins.

Malgré les obstacles, les femmes des quartiers populaires jouent un rôle de stabilisation crucial. Médiatrices lors de conflits de voisinage, relais éducatifs ou sanitaires informels, elles contribuent à maintenir l’équilibre des communautés. Entre commerce de survie, entraide quotidienne et initiatives discrètes, ce sont elles qui, chaque jour, tissent les liens invisibles qui permettent aux quartiers populaires de Brazzaville de tenir debout.

Larsain Polmer
Légendes et crédits photo : 
Une femme exerçant son petit commerce / DR
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