Des migrants naufragés et secourus en mer, des noyés, des survivants qui errent aux portes de l’Europe… jour ordinaire d’un drame sans superlatif nouveau.
Vous parlez de migrants morts en Méditerranée mais ceux de quel jour, quelle semaine, quel mois, quelle année ? Tel un catalogue bien nourri, le drame de l’immigration offre toutes variétés de catastrophes, des plus banales aux plus spectaculaires. Voulez-vous un film d’horreur sur les décapitations d’Erythréens ? Un alignement de cadavres sur une plage de Méditerranée ? Des tombes sans croix ou des centres d’accueil bondés ? Vous les voulez au nord ou au sud de l’Italie ? Vous n’avez qu’à demander : au magasin de l’horreur débordante, l’immigration fournit tout.
La dernière nouvelle dans ce contexte manque vraiment d’originalité. Des garde-côtes suédois ont annoncé mercredi avoir trouvé une quarantaine de migrants morts asphyxiés dans la cale d’un vieux bateau de pêche libyen. Rien que ça ! Autant dire de la routine fatigante. Car le 15 août déjà, la marine italienne avait elle aussi découvert les cadavres de 49 migrants, morts asphyxiés dans la cale d'une barque de 13 mètres, où ils avaient été maintenus par les passeurs à coups de pieds et de poings. Et puis que dire des 700 migrants qui gisent toujours par 300 mètres de fond (distance certifiée désormais après des chiffres discordants) au large des côtes siciliennes ?
Leur bateau avait sombré le 19 avril dernier alors qu’ils n’étaient qu’à quelques encablures du petit port italien de Lampedusa. Les passeurs qui pilotaient l’embarcation sont actuellement en prison. Ils font partie des quelque 800 de ces trafiquants que la police italienne a repérés et arrêtés et conduits en prison pour être jugés. Mais à cette hauteur de la gravité des faits, même une telle nouvelle n’en constitue plus une pour les associations humanitaires. Que valent 20 ans de prison ou plus ou moins face à 700 cadavres qui disent depuis cinq mois dans le ventre d’un bateau sans même que leurs familles ne sachent qu’elles attendent des fils, des filles et des petits-fils qui ne reverront jamais la lumière du jour ? Ne reviendront pas à la vie ?
Mais le drame de l’immigration est un chassé-croisé : des morts en infini, des survivants transbahutés dans les villes d’Europe qui se barricadent. Les garde-côtes italiens ont secouru dimanche dernier 300 migrants supplémentaires en mer Méditerranée. Ils avaient auparavant coordonné, avec l'assistance de navires européens, le sauvetage de quelque 4.400 migrants d’autres au cours de la seule journée de samedi. Le total de personnes secourues en 24 heures cette journée-là, disent les services spécialisés, est l'un des plus élevés de ces dernières années. Une statistique, un record qui seront vite battus !