Gilbert Cesbron affirme, « la devise de l'époque, c'est "le sexe et l'argent", c'est-à-dire corps et biens. Cela sent le naufrage ». C'est dans cette dynamique que s'oriente le récit à multiple visages du prêtre écrivain, écrit comme un film et publié dans la collection encres noires des éditions L'Harmattan, en 2017.
Le roman "Autant partir que sacrifier", comme il est rapporté à la quatrième de couverture, décrit une histoire émouvante autour de Marie-Noëlle et Martial, au milieu des années 1980, dans un Congo qui jubile et danse sans pour autant parvenir à trouver ses marques et ce, malgré les slogans tous azimuts.
Les paradoxes et les tragédies qui rythment ce récit traduisent le drame d'une société aux prises avec diverses logiques, où se mêlent tradition, modernité et conformisme.
L'écrivain, par l'intermédiaire d'un narrateur externe et omniscient, décrit les petites cachotteries de la vie quotidienne entre amis ou parents, ou encore en couple. Les secrets de la vie des femmes y sont mis en évidence à travers différentes fresques pouvant donner lieu à de précieux story-boards.
Le roman débute par des scènes vécues dans une bourgade qui finit par s'agrandir. Les interférences culturelles sont remarquablement appréciées à travers le choc des coutumes africaines avec l'implantation du christianisme pendant la période coloniale. Tout n'étant ni clean ni foncièrement reprochable de part et d'autre.
Il est, par ailleurs, mis un contraste entre les préoccupations des vieilles générations et des jeunes, celles des femmes et des hommes, des villages et des villes. Une sorte d'enchevêtrement d'histoires inachevées présente tout un panorama social qui transporte l'imaginaire du lecteur sur mille et une lieues, au Congo et ailleurs.
Au Congo, par exemple, l'auteur nous fait revisiter la culture mbochi à travers la présentation anthropologique de la structure de la parenté et le déroulement du mariage coutumier entre deux familles par l'intermédiaire des "obéla", modérateurs traditionnels.
Cependant, c'est juste à la fin de la narration qu'on découvre le sens du titre du roman. Martial est confronté aux illusions des sectes ésotériques qui proposent des ascensions aux débouchés funestes. Face à cette pesanteur, il choisit de mourir plutôt que de sacrifier un être humain.
Gyscard Gandou d'Isseret, prêtre catholique, est chargé de cours de philosophie à l'Université Marien-Ngouabi. Il est auteur de plusieurs livres parmi lesquels "L'espace d'une vie" aux éditions Bénévent en 2011, et "Les destins déchirés par l'amour" à L'Harmattan en 2016.