Lire ou relire: « L’écolier d’Abkar Djombong » de Mahamat Aly El-Hadj

Mercredi, Décembre 19, 2018 - 09:45

Sous-titré "Tu seras tchadien, mon fils", le roman de l’écrivain tchadien est le récit des péripéties d’un jeune enfant né d’un père marabout et Khalife, dans un village reculé, Manga, où les habitants sont très ancrés dans la tradition malgré l’influence de la modernité.  

Les mots « Dör, carrappe, hadodoyoka, le gangan, le tindirik, etc. » sont des emprunts, ayant double signification. Ils évoquent des lieux et activités qui rassemblaient tous les jeunes gens du village à des occasions diverses. Ils sont aussi l’expression d’une Afrique encore vierge, une Afrique unie, où règnent encore des valeurs proprement africaines, où la datation des événements se fait en référence à un événement, une Afrique qui ne connaît pas encore la colonisation. Mais l’arrivée du colon coïncide avec la modernité qui transforme le visage de Manga. Celle-ci est caractérisée, entre autres, par la scolarisation des enfants nègres à l’école des Blancs et par l’exode rural.

Ainsi, sera mis à l’école Mohamed Aly El-Hadj Ahmat qui, tour à tour, effectuera ses études dans les établissements scolaires des villages et villes de Ouaddaï : Abkar, Am-dam, le lycée franco-arabe. Détenteur d’un baccalauréat série A4, il est recruté en qualité d’enseignant au Collège d’enseignement général de Mongo.  Habité par le souci d’être utile à son pays, il effectua des études universitaires à l’université de N’Djamena où il obtient un DEUG. De là, il se retrouve à l’Université Marien-Ngouabi de Brazzaville à cause de la déchirure du tissu social de son pays occasionnée par des conflits armés.

Mû par les valeurs démocratiques comme la plupart des étudiants en Afrique ou ailleurs des années 1960, Mohamed Aly El-Hadj Ahmat devient militant. Son militantisme consiste à libérer son pays, le Tchad, des mains des citoyens « sans cœur » qui bafouent la dignité humaine (p. 64).

Au-delà de la narration, "L' écolier d’Abkar Djombong", par son réalisme, évoque la double situation ambivalente actuelle des pays africains : jadis la vie au village était paisible et l’avenir certain. Les valeurs étaient les principes de toute vie humaine. Les habitants avaient un même idéal. Par contre, la vie moderne est aux antipodes de celle-ci. Elle est l’expression d’exclusion, de division et de marginalisation voire d’élimination des faibles.

Aubin Banzouzi
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