Entre répétitions et administration de son espace, Zao, de son vrai nom Casimir Zoba, de retour du festival Africolor où il a enchaîné trois dates en plus de ses passages dans les médias tels que RFI, TV5, nous parle de son nouvel opus nommé « Nouveau combattant ». Des compositions qui reposent sur la paix, l’unité et l’amour. Rencontre.
Les Dépêches de Brazzaville : De quoi parle cet album ?
Zao : "Nouveau combattant" ne parle pas exclusivement de guerre. J’invite plutôt les Congolais et les hommes du monde entier à s’approprier les concepts de paix, de patriotisme et d’amour du prochain. Des valeurs humaines sans lesquelles, nous ne pouvons dépasser les différences ethniques, culturelles et politiques. Cependant, au-delà de ces idéaux, Nouveau combattant est aussi un sublime voyage dans les arcanes de la rumba, de notre musique traditionnelle où j’y apporte ma touche personnelle en tant que chercheur. Et pour couronner le tout, je chante en français, et utilise les onomatopées en lari, lingala, kituba.
Vous dites que Nouveau combattant est une suite logique de votre album Ancien combattant. Comment l'expliquez vous ?
C’est une suite logique, car lorsque l'on parle des anciens combattants, c’est en référence aux deux guerres 14-18, 44-45. Aujourd’hui, il y a de nouveaux foyers de guerre, de tensions dans le monde. Et, en tant que diseur d’opinions je ne peux me taire quand des choses abominables se passent dans le monde (Katanga, Algérie, Lybie, Tunisie). Il faut que je réagisse. D’où Nouveau combattant qui exprime le ral-le-bol des nouveaux combattants qui en ont plus que marre de faire la guerre. Muni d’un drapeau blanc à la main, le nouveau combattant est fatigué de se battre, de violer, piller, tuer et revendique la paix.
Et donc Nouveau combattant porte alors un message d’espoir ?
En effet, et pour tout vous dire « J’en ai marre » était le titre de départ de cet album. Mais par la suite j’ai voulu faire un pont entre l’ancien combattant et le nouveau combattant. Pourquoi ? Parce je pense que le nouveau combattant a juste changé de veste et qu’aujourd’hui celui ci est fatigué de multiples désastres humains, matériels et financiers causés à travers le monde. Il en a marre de recommencer à zéro et son souhait à ce jour est de voir ses enfants grandir, manger à leur faim et de sauvegarder ses biens si chèrement acquis. De plus, au Congo, personne ne souhaite revenir sur les drames que nous avons vécus en 1993, 1997, 1998. D’où les négociations et les dialogues ça et là. Et mon devoir en tant qu’artiste, n’est-il pas celui de dire et apporter mon opinion par rapport à telle ou telle autre situation ? Je ne suis ni politique, ni pyromane car mon rôle est celui d’unir. Griot oui, diseur d’opinion aussi dans la mesure où je ne suis pas en marge de la société, je m’implique en ce sens que je chante pour le développement de mon pays et du monde. Et puis, nous savons tous que la guerre n’est en aucune façon un moyen de bâtir un pays, une nation.
Votre humour et vos sarcasmes sont cités comme étant vos empreintes. Quelle est votre opinion à ce sujet ?
C’est l’humour qui nous fait vivre, et s’il était absent, nos vies seraient bien fades au regard des drames que tout Congolais a subis lors des conflits sociopolitiques. Nous avons perdu des êtres chers et nos biens. Et s’il n’y avait pas l’humour, je me demande comment on allait dépasser tout cela. Aujourd’hui tous les psychologues et psychiatres seraient au chevet des tous les Congolais. J’utilise l’humour pour ne pas flancher. Il m’aide à garder le cap. Mais comme au Congo tout est pris avec des pincettes et que les gens sont très susceptibles, mes chansons sont analysées avec beaucoup de sous-entendus, ce qui me pose parfois des problèmes. Mais peu importe, je suis un chanteur engagé et je dis ce que je vois, je dis ce que je pense car quand on n’est pas engagé quel que soit le métier qu’on exerce, on ne vit pas. Par ailleurs, le Congolais aujourd’hui ne pense qu’à la politique. Malheureusement, il ne pense plus à l’excellence, moi j’ai été formé à l’école de La Fontaine, Victor Hugo qui parlaient des choses graves par le biais de l’humour.
On sait que la vie d’artiste au Congo n’est pas des plus reposantes. Qu’est ce qui vous pousse à aller de l’avant ?
Ma passion pour la musique. J’aime ce que je fais et je ne m’imagine pas vivre sans la musique. Et je pense sincèrement que si tout le monde était musicien, nous aurions moins de problèmes dans la vie. Parce que la musique unit quel que soit le continent, la culture ou la race. La musique parle à l’âme et la soigne en même temps. Bref, j’aime ce que je fais et c’est cela qui me permet de tenir debout.
Est-ce que vous vivez de votre art
Oui et non. Ma vraie richesse est ma renommée dans mon pays et à travers le monde. L’argent vient après. Aujourd’hui, tout le monde me connaît grâce à la musique alors que je suis un pauvre instituteur au départ. Et vous savez combien ceux-ci gagnent. Mais grâce à la musique, je m’en sors. Personnellement, le bien matériel m’importe peu, ce qui compte vraiment c'est que je continue de vivre mon rêve, c'est-à-dire être sur la scène et cela sous entend le travail car ne dit-on pas « aides-toi et le ciel t’aidera ». Si tu ne travailles pas, ne t’attends pas récolter quoique ce soit.
Votre actualité ?
Je ne suis pas statique. Tout dernièrement nous avons donné des séries de spectacles à Pointe Noire, Sibiti, Dolisie, Nkayi. Cette aventure s’est effectuée avec la société de téléphonie mobile Azur. Donc, je sollicite des sponsors, des opérateurs culturels pour nous accompagner.