Bikouta Moundele Nely: « Quel bonheur quand le client est content après les dernières retouches… »

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Vendredi, Mars 17, 2017 - 14:15

Ensemble en pagne, robes en satin ou en mousseline, jupes, chemisiers de femmes et même robe de mariée originale ! Voila quelques échantillons que Bikouta Moundele Nely, célibataire et mère de deux enfants, réalise.

Des pièces sur mesure, uniques et personnalisées, grâce au savoir-faire de la jeune couturière ainsi qu’à son grand sens de l’esthétique. Un métier qu’elle apprit à aimer et apprivoiser avec le temps car la couture est devenue non seulement une passion pour Nely mais aussi et surtout sa planche de salut. « En classe de troisième, je tombe enceinte et après la naissance de mon fils, je décide de regagner le banc de l’école mais ma tante m’en dissuade et préfère que je rentre dans une école de métier », explique Nely qui accorde pourtant peu d’importance à cette directive jusqu’au jour où une prophétie lui est adressée lors d’un culte. « La prophétie disait que je devais trouver une école pour apprendre un métier ( peu importe le métier ) et que c’est grâce à cette formation que je pourrai un jour prendre soin de ma famille », relate Nely, la quarantaine qui opte pour une formation en électricité auto.

Mais très vite elle abandonne cette idée et adhère au choix de ses proches. « Mes tantes n’arrêtaient pas de me répéter que c’était un métier pour homme, que je devais faire soit la coiffure ou la couture. Et au finish j’ai opté pour la couture, car je m’y sentais plus à mon aise », renchérit-elle. « A mes débuts, je n’étais pas très motivée. Je fréquentais à dent de scie l’atelier de mère Sera au quartier Bifouiti où j’étais inscrite pour une durée de trois ans », ajoute Nely qui s’aperçoit que lors de ses absences prolongées, celles qui avaient commencé la formation en même temps qu’elle s’amélioraient et étaient payées à la tâche. « Cela a provoqué un déclic en moi et j’ai commencé à prendre conscience. Puis de fil en aiguille, j’ai commencé à trouver ce métier très épanouissant car je pouvais suggérer aux clients des modèles, et laisser libre cours mon imagination quand je me retrouvais devant ma machine », confie la jeune dame.

Si elle doute encore d’elle à la sortie de cette formation, Nely, encouragée par ses proches, décide en 1999 de voler toutefois de ses propres ailes dans les arcanes de la couture où elle apprend étape après étape, les rouages du métier. Aussi, dès l’ouverture de son salon en 1999, Nely séduit les habitants du quartier Kinsoudi et des environs tant par la qualité de ses coupes, ses finitions et sa promptitude. Très rigoureuse sur ce qu’elle confectionne, sa clientèle est composée des personnes disposant de toutes les bourses. « Mes prix varient en général entre 3000FCFA et au-delà. Ce ne sont pas des prix figés mais on peut marchander et trouver un compromis », explique la couturière qui précise « qu’en plus d’être passionnant, ce métier est tout aussi gratifiant quand tu sais t’organiser. Il y a certains mois quand tu travailles bien tu peux obtenir plus de cent mille FCFA (100.000FCFA), mais il y a des mois aussi ou pour atteindre soixante quinze mille Fcfa (75.000FCFA) on peine. C’est pour cela qu’il est important d’épargner sinon c’est difficile de s’en sortir », souligne -t-elle.

Aujourd’hui, la couturière a cinq élèves au sein de son atelier. « Ce qui est dommage, c’est que ces filles viennent ici par enthousiasme et non par passion. Elles se plaignent sur des petites choses pour justifier leurs absences répétées, tel que je n’avais pas d’argent pour le déplacement, il n’y avait personne pour garder l’enfant…et à la fin, elles fuient sans avoir maitrisé quoique ce soit ».

Résultat : sur la dizaine des filles qu’elle a formées, une seule  a ouvert son atelier en bonne et due forme. Heureusement il y a des assidues et Madiaou Maléla, la vingtaine révolue, mère d’une petite fille en fait partie. « Cela fait deux ans que je suis ici. Il y a une très bonne ambiance et j’apprends à mon rythme. J’ai commencé à coudre, notamment les modes popo et les chemises classiques, mais j’ai encore du mal pour la coupe », explique cette dernière qui s’exerce craie en main et le mètre sur le cou à la coupe sur l’œil vigilant de maître Nely.

Nzouba sylvie, la trentaine qui a aussi trouvé sa place chez Nely Couture il y a quatre mois, ne désespère pas, même si elle a vraiment du mal à se faire la main. « Je suis de nature très patiente et donc je sais que je vais m’en sortir car je suis ici pour appendre », dit-elle le sourire aux lèvres.

Un métier passionnant mais aussi laborieux. Nely dit travailler de façon prolongée (assise ou débout) et cela lui provoque parfois des douleurs lombaires. Mais en dehors de cet aspect sanitaire, Nely est aussi obligée de faire face aux exigences de la clientèle parfois excentrique avec des modèles saugrenus. « Ce qui fait que certains délais de commande ne sont pas respectés et les clientes rouspèctent mais, elles ignorent que leurs requêtes rendent nos horaires irréguliers et le rythme de travail malheureusement très intense », informe Nely visiblement extenuée par le labeur.

Consciente de certaines de ses faiblesses, (vu qu’elle n’est pas passée dans une école de couture à proprement dite), Nely apprend tous les jours de ses erreurs. « Ce n’est pas seulement le talent qui fait la couturière, c’est surtout l’expérience et la pratique qui permettent de maîtriser la coupe, le geste, la retouche et la couture. À ces ingrédients, il faut ajouter, le bon sens de l’écoute pour faire correctement ce que l’on attend de toi, et ne pas hésiter à faire des propositions quand une cliente est indécise », a affirmé Nely qui est vraiment très appréciée par ses clientes.  « Je suis une fidèle cliente de Nely, c’est vrai qu’elle est parfois farceuse ( elle ne respecte pas les rendez-vous), mais le résultat est toujours parfait, puisqu’elle favorise l’esthétique. Voila pourquoi je lui reste fidèle », avise Ida, cliente fidèle de Nely Couture. Mais pour Nely, sa satisfaction est palpable  au moment de la livraison de la commande car, dit –elle, ciseaux en main et visage radieux. « Quel bonheur quand le client est content après les dernières retouches, c’est plus que le gain enfin de compte ! ».

 

Berna Marty
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