Universitaire, écrivain et critique littéraire né à Brazzaville, Noël Kodia-Ramata publie son onzième ouvrage «Au-delà des maux ou du sang et des larmes des uns et des autres » aux éditions LC. Un roman qui traite de la guerre civile et de son inutilité pour les nouvelles générations.
Il y a des évènements qui laissent des souvenirs indélébiles dans la vie des individus et des communautés et qui inspirent les artistes et les hommes de lettres. La guerre en est un. C’est le sujet phare du nouveau roman de Noël Kodia-Ramata. L’auteur s’est inspiré des évènements vécus lors des guerres civiles des années 1990 à Brazzaville pour concevoir une fiction témoignant le climat de cette époque afin d’en tirer les leçons nécessaires.
Il va sans dire qu’à travers son texte, Noël Kodia-Ramata ne s’érige ni en journaliste ni en historien pour y rechercher l’objectivité ou la véracité des faits. Son roman demeure comme toute œuvre littéraire une histoire imaginaire, mais une histoire fondée sur certaines anecdotes.
Pour lever cette équivoque, le narrateur relève quelques leçons d’exégèses du texte littéraire dans une conversation entre deux protagonistes du récit : «II n’y a pas de message dans mon texte. Je n’ai rien à apprendre aux lecteurs même si je fais allusion à ce que nous avons vécu. Les historiens et les journalistes sont mieux placés que moi pour un véritable récit sur la guerre de Brazzaville. Pour moi, c’est le texte qui compte.» (P.186) «Au-delà des maux» est un roman que l’auteur a publié en 2005 aux éditions Menaibuc sous le titre «Les Enfants de la guerre». Ayant suscité une forte demande chez certains francophones, l’écrivain a pensé retravailler son texte en l’actualisant pour le diffuser en fin de compte au Congo d’où le récit a pris source.
Dès l’incipit ou début du texte, la narratrice manifeste son désarroi face au drame de la guerre. La suite du récit est un enchaînement d’évènements mettant en relief les horreurs et les puanteurs de la guerre civile avec un étonnement aboutissant à quelques questionnements on ne peut plus pertinents :« -Au fait, dis-moi Stève, pourquoi ceux qui nous demandent de nous battre ne s’entendent-ils pas avec leurs adversaires puisque nous sommes un même peuple et que l’avenir du pays appartient à nous tous ?»(P.23).
Le narrateur ne se contente pas seulement de décrire avec réalisme les actions du front et la vie des victimes et des assaillants de tout bord, mais il met surtout en évidence les aspirations profondes de la jeunesse et du citoyen lambda à travers cette chronique assez pathétique. Celles-ci s’expriment par le besoin d’instruction, d’autonomisation et d’unité. Comme on peut lire: «Atipo, reprit Stève, nous serons heureux et nous serons nous-mêmes le jour où nos hommes politiques comprendront qu’il nous faut des calculatrices et des ordinateurs à la place de ces trucs (…). Des pelles et des houes à la place de ces lance-roquettes. » (P.24) Ou « notre pays doit être un tout et indivisible. »(P.77). Cependant, au-delà de cette peinture des maux, l’auteur assigne à sa plume une visée esthétique en arborant de nouvels procédés dans l’écriture du roman. En effet, Noël Kodia-Ramata élabore une croisée de récits, de destins et une ébauche d’un autre roman dans le roman sans alourdir le fil de la trame avec un peu d’humour et d’idylle. Autrement dit, au-delà des maux vécus, il faut des mots conçus ou cousus pour sensibiliser les générations futures aux affres de la guerre.
Aubin Banzouzi