De passage à Brazzaville, Louly Essini, la quarantaine, attachée économique et commerciale au consulat général de Guangzhou en Chine depuis 2013, nous parle de son parcours et de sa mission à Gouangzhou, ville populaire au sein de la communauté congolaise. Divorcée et mère de quatre enfants, derrière son sourire et sa douceur apparente, on sent poindre une force de caractère et une volonté sans borne à vouloir réaliser ses rêves.
Les Dépêches de Brazzaville : En chine depuis quatre ans, pouvez-vous nous parler de vos activités quotidiennes et quels sont les difficultés que vous rencontrez au quotidien ?
Louly Essini : A caractère économique et commercial, le consulat général du Congo à Guangzhou qui a ouvert ses portes en 2013 a pour objectif majeur de faciliter et d’encourager les investisseurs chinois à venir au Congo et y investir. Donc tous les jours ou presque nous organisons des activités dans ce sens, (des conférences, et participons aussi à des rencontres organisées par le pays d’accueil), une manière pour nous d’être en contact permanent avec les sociétés et les entrepreneurs chinois et de susciter d’éventuelles partenariats entre nos deux pays. Pour ce qui est des difficultés, il y a certes la barrière de la langue, mais on essaye tant bien que mal à se mettre dans le bain. L’autre problème est sans aucun doute la communauté chinoise qui est loin de l’image que nous avons d’elle ici au Congo. Et quand on vit en Chine, on se rend vite compte de cette réalité car on est souvent confronté à un problème de « xénophobie » vu que cette nation est longtemps restée replier sur elle-même. Heureusement que nous avons le soutien du gouvernement chinois et les multiples efforts des médias chinois à vouloir améliorer les rapports entre la Chine et les étrangers. Pourtant les rapports restent difficiles combien même les diplomates que nous sommes essayons de mener à bien notre mission.
LDB : En dehors de ces activités économiques, avez-vous d’autres approches pour améliorer la qualité des rapports entre le Congo et la Chine ?
L.E : Au niveau de Guangzhou, il y a neuf représentations africaines. Ensemble, nous organisons des activités culturelles de façon à montrer nos richesses tant économiques que culturelles. Le but de ces rencontres repose essentiellement sur les échanges et partages, de sorte qu’au sortir de ces activités ces activités nous ayons des accords entre nos chambres de commerce respective, etc. C’est aussi des moments enrichissant puisqu’on apprend beaucoup de ce peuple.
L.D.B : Vous êtes nommée attachée économique et financière au consulat général du Congo en Chine, quel est le regard de vos collègues hommes à votre égard ?
L.E : Je dirais que là où il y a des hommes (femmes et hommes) il y a toujours des petits problèmes et surtout le problème de leadership. Et les hommes n’acceptent pas facilement d’être dirigés par une femme surtout quand celle-ci prend soin d’elle, et ne lésine pas sur son apparence. Ils pensent tout de suite qu’elle n’a rien dans la tête, ou veut seulement séduire. Mais on peut tout de même se faire belle pour soi et avoir un cerveau bien fait bon sang ! Je pense qu’on ne devrait pas juger les gens par rapport à leurs apparences physiques mais plutôt à leurs compétences homme ou femme.
L.D.B : Déjà quatre ans en Chine, quel est votre plus beau souvenir depuis la prise de votre poste ?
L.E: Pour l’instant, mon plus beau souvenir est mon intervention (ou j’ai eu à faire une carte postale du Congo) lors d’une grande conférence internationale en Chine ou le Congo était le seul pays parmi neuf pays africains à faire partie de cette conférence. Et lors de cette représentation, une grande amie à moi est venue du Canada m’assister et elle y sortie les larmes aux yeux tellement qu’elle était émue de me voir à la tribune d’honneur. C’était vraiment un moment fort. En dehors de cela, il y a le quotidien, ou nous allons à la rencontre de pleins de monde et cela nous apporte un peu plus et change forcément notre vision de l’entreprenariat, du commerce international…Mais ce sont aussi des moments de forte chaleur humaine, ou l’on découvre l’art culinaire chinois, la religion et l’incroyable richesse culturelle de ce pays. Nous profitons aussi de cette occasion de nouer des liens d’amitié et intéressons des jeunes entrepreneurs à venir visiter le Congo et c’est pour cela qu’il est plus qu’urgent de renforcer le secteur du touriste afin de donner envie aux étrangers de venir visiter le Congo.
L.D.B : uvez nous parler brièvement de votre parcours ?
L.E : Après ma licence de sciences et techniques de la communication à Bayardelle, j’ai fait plusieurs formations dans le secteur de l’économie et des finances. Suite à cette série de formations, j’intègre le ministère des finances et me retrouve agent des impôts quelques années plus tard. Mon affiliation au ministère des Affaires étrangères s’est fait progressivement avec ma casquette directrice LSSID, (qui s’occupe du bâtiment) ou je faisais de temps à autre des prestations de services … C’est par rapport au travail que je fournissais qu’à l’ouverture du consulat en 2013, on a fait appel à moi. Etant donné qu’à Guangzhou le consulat qui ouvrait ses portes était spécifiquement à caractère économique et commercial. Et dans la pensée du gouvernement, ce consulat devrait faciliter l’entrepreneur congolais, une fois en Chine pour les démarches administratives, la langue…. bref cette nouvelle institution (en outre de l’ambassade du Congo à Pekin) avait pour rôle de facilitateur dans le domaine spécifique du commerce et de l’économie… Et comme cela faisais déjà dix ans que j’effectuais des voyages dans cette ville, on a pensé que je pouvais faire partie de cette équipe.
LDB : Vous avez plusieurs casquettes: femme d’affaires, directrice d’une société, attachée économique et commerciale au consulat général de Guangzhou en même temps mère de cinq enfants. Comment vous faites pour vous en sortir ?
L.E : Je fais des sacrifices car la vie est faite de sacrifices, et la vie est un choix. J’admets que ce n’est pas facile car être maman et femme sur le terrain, c’est-à-dire une femme entreprenante, ce n’est pas tous les jours roses. Mais je voudrais dire qu’on n’est pas seulement femme en portant le pagne, on peut aussi porter le pantalon et tracer sa route. Et moi j’ai décidé de tracer la mienne. Mais depuis que je suis en Chine, je ne suis plus la DG de la société LSSID, j’ai passé les commandes à mon collaborateur et je ne fais que superviser le travail. Du côté de la famille, j’ai dû me séparer de mes enfants avec bien évidement un pincement au cœur comme toute mère car il n’y a pas d’écoles consulaires en Chine et les études coutent extrêmement chères. Ce n’est pas évident car tu t’inquiètes pour leur éducation, en effet, même si tu amasses de l’argent, ça ne te servira à rien si quelque part tes enfants ne sont instruis et n’ont pas acquis des solides bases pour affronter la vie.
LDB : Un message à l’endroit des femmes ?
L.E: Aujourd’hui la femme ne peut pas continuer à attendre que le mari apporte tout dans un foyer. La femme doit aussi contribuer à sa mesure dans son foyer. C’est révolu, l’époque ou le rôle de la femme consistait uniquement à accoucher et à éduquer les enfants. Imaginez une femme entretenue, qui divorce, ou perd son mari que deviendra-t-elle avec ses enfants ? Je pense que Dieu a doté la femme d’un grand pouvoir dans la mesure où elle peut non seulement être mère mais aussi femme active. La femme doit accompagner son mari, car on dit derrière un grand homme se cache une grande femme, cela suppose que la femme a un grand rôle à jouer dans son foyer en tant que mère et épouse. La femme doit être créative et croire en elle car quand on n’a pas d’ambitions dans la vie, on reste au même point et les autres avancent. ll faut oser pour parvenir à ses rêves vu que le succès est la meilleure des vengeances.