Elles s’appellent Eleath Boulingui, 28 ans, et Christelle Iniengo, 38 ans. Elles font un travail exceptionnel à la Maison des seniors à Mfiou (qui a ouvert ses portes en janvier 2016) en tant qu’auxiliaires de vie au service des personnes du troisième âge. Un métier noble, éprouvant parfois mais tellement gratifiant sur le plan relationnel comme elles l’ont laissé entendre. Deux jeunes filles pleines de vie avec en plus de l’amour à offrir.
« J’aime apporter mon aide à ceux qui sont dans le besoin. Et quand j’ai entendu parler de la formation des auxiliaires de vie à la cathédrale, je n’ai pas hésité un instant à m’inscrire et Dieu a fait grâce pour que je sois retenue », lance Eleath Boulingui, secrétaire de formation qui a travaillé à MTN Pointe-Noire en 2009 et à Brazzaville (2012-2015) pendant deux ans avant de s’engager, il y a seulement un an, en tant qu’auxiliaire de vie à la Maison des seniors (avec 30 pensionnaires) à Mfliou, dans le 7e arrondissement de Brazzaville.
Même si ce métier se révèle parfois pénible (parce que certains pensionnaires malintentionnés commettent des bévues pour énerver le personnel), Eleath et les autres auxiliaires de vie s’y accommodent sans rechigner. « Certains pensionnaires font leurs besoins dans les couches à jeter et en les ôtant seuls, ils en mettent partout sur le lit et si vous les réprimandez, ils se moquent de vous et ne prennent même pas la peine de s’excuser. C’est énervant parfois mais cela, on le savait déjà en arrivant ici », expliquent, l’une après l’autre, les deux auxiliaires qui ont suivi une formation durant quatre semaines sur l’assistance des personnes du troisième âge (projet initié par l’association Congo Assistance) à la cathédrale Sacré-cœur chez les petites sœurs des pauvres.
« Parfois, pour voir notre réaction, certains pensionnaires urinent expressément sur les carreaux et attendent qu’on les réprimande. En ce qui me concerne, je nettoie tranquillement et ne manque pas de sermonner le pensionnaire tout en lui expliquant que l’acte qu’il venait de poser n’était pas bon…Mais à cet âge, ils deviennent comme des enfants », a avoué Christelle qui, à ses débuts, avait du mal à manger une fois chez elle.
« Mais on a vu pire. Dès fois, devant l’urgence, on est obligé de nettoyer les pensionnaires sans gants, ce n’est pas que cela manque mais c’est pour éviter qu’ils en mettent partout, l’essentiel est de se désinfecter une fois la tâche exécutée », a renchéri Christelle, qui n’éprouve plus de dégout en les nettoyant car, dit-elle, « ce ne sont plus des corvées, mais des tâches quotidiennes que j’exécute avec beaucoup d’amour en me disant que cela pourrait être un membre de ma famille… Et puis, à leur âge, ils ont plus que jamais besoin de notre affection et notre attention. »
A ces tracas quotidiens, s’ajoutent les chamailleries, les bouderies, les petites jalousies entre pensionnaires auxquelles doivent faire face Eleath, Christelle et les autres auxiliaires de vie. « A leur âge, on devient capricieux, susceptible et têtu…. Il arrive qu’on les blâme, histoire de les faire fléchir, mais tu parles, s’ils veulent t’emmerder, ils ne se gêneront pas… », relate Eleath qui, enfin de journée, est extenuée. Mais elle éprouve néanmoins une réelle satisfaction en accomplissant son devoir car pour elle, travailler dans cet hospice est un signe du destin. « Longtemps je voulais me rendre utile en aidant les personnes démunies, et lorsque cette annonce sur la formation des auxiliaires de vie m’est parvenue, j’ai sauté sur l’occasion, et je ne le regrette pas », explique la jeune femme visiblement satisfaite.
Heureusement, il y a des journées plus calmes comme l’a révélé Christelle. En dehors de son travail, elle accompagne aussi les pensionnaires malades à l’hôpital avec le médecin du centre. « Le matin en arrivant, nous aidons les pensionnaires invalides à prendre leur bain, et ils sont au nombre de quatre à ce jour. Puis, on s’occupe des chambres (faire le lit, arranger le garde- linge, faire la serpillère) et des sanitaires car leur environnement doit être propre pour éviter qu’ils soient en contact avec les microbes », précise Christelle
Si le métier d’auxiliaire de vie peut paraître le plus gratifiant sur le plan personnel et relationnel, il n’est pas pour autant bien rémunéré comme l’a indiqué Eleath. Mais peu importe, Eleath et Christelle ne le font pas pour s’enrichir. Leur objectif premier est sans aucun doute celui de donner aux personnes du troisième âge le sourire et la paix intérieure, chose qu’elles n’ont malheureusement pas au sein de leur famille. La plupart du temps, elles sont taxées de sorcières à cause de leur âge avancé et leurs cheveux blancs.
Devenues une charge pour certains à cause de la maladie et accusées de sorcières pour d’autres au sein de leur famille, ces personnes du troisième âge se réfugient dans les hospices en quête d’amour. Si quelques-uns ont du mal à s’intégrer, la majorité retrouve rapidement la force de panser les blessures antérieures et de sourire à nouveau. « Le personnel est gentil, ces jeunes hommes et femmes s’occupent bien de nous même quand nous ne sommes pas très aimables avec eux », lance Joseph Ganziama, 79 ans. Même satisfaction de la part de Ngounga, septuagénaire, qui déclare: « Ils sont toujours souriants, serviables et se soucient beaucoup pour nous. Même dans nos familles, on n’est pas aussi bien traité », a informé cette dernière qui a refusé l’offre de sa fille pour aller s’installer en Europe avec elle.
Des compliments dont les jeunes filles sont fières et reconnaissantes vu que ce métier demande patience, maîtrise de soi et surtout un amour inconditionnel pour les autres.. « Nous avons tous besoin d’amour et d’attention à n’importe quel âge de notre vie, alors apporter un peu de joie à ces personnes, les accompagner jusqu’à leur dernier souffle en leur offrant notre temps et notre amour, cela nous rend heureuse et plus sensible aux problèmes des autres », a fait savoir Christelle, déterminée à poursuivre sa mission au service de ces personnes, en les aimant, aidant et accompagnant du mieux qu’elle peut.