Phénomène des groupies : pourquoi devient-on fan ?

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Vendredi, Février 2, 2018 - 11:15

En analysant de plus près le fanatisme, l’on réalise qu’il n’est pas nouveau en soi puisque de tous âges et de tous horizons, de nombreuses personnes tombent en admiration pour leurs semblables. Elles sont notamment emportées par une passion excessive pour des chanteurs, musiciens, footballeurs, artistes, etc., et leur dédient leur vie entière.

En Afrique centrale, et plus particulièrement dans les deux Congo, il y a bon nombre de fans pour telle ou telle autre star. Parler de Bifouma, Didier Drogba, Samuel Eto’o, Messi, Cristiano, Neymar, Michael Jackson, Johnny Halliday, Golbert, John Cena, et vous ne manquerez pas de susciter les réactions de leurs fans où que vous soyez, que ce soit en France, en Espagne, au Brésil, aux Etats-Unis ou partout ailleurs.  Mais qui sont les fans ? Ceux qui le sont, naissent-ils ainsi où le deviennent-ils ?

Le terme "fan" est un diminutif du mot fanatique qui signifie celui ou celle qui a pour quelque chose, quelqu’un, une admiration passionnée, enthousiaste. Le fan est donc une personne qui défend de façon démesurée ses croyances et ses opinions. C’est également celui qui s’enthousiasme sérieusement, voire aveuglement pour quelqu’un. Aussi convient-on de définir l’obsession de fanatisme comme une passion excessive ou un intérêt outré que l’on porte à une personne. Il s’agit en quelque sorte d’un état d’esprit où il n’y a plus de limites dans les actions que le fanatique entreprend pour faire triompher ses idéaux.

Pour les gens qui font l’objet de cet emballement, s’ils existent, leur vie, c’est d’être fan : ils suivent leurs idoles, jour et nuit, sans répit, au point de les placer au centre de leur existence. Cette adhésion inconditionnelle à une cause amène le fan à se comporter parfois de façon violente, parce que persuadé que son idée est la seule meilleure, et le conduit à sous-estimer les opinions des autres.

On trouve les fans dans différents domaines d’activités : politique, sport, musique, médias, etc. « Je suis fan des Diables rouges, l’équipe nationale de la République du Congo, et je le resterai toute ma vie », a lancé un Brazzavillois lors de la 5e édition du Championnat d’Afrique des nations de football (Chan), organisée au Maroc. « J’aime également le sport, mais je suis attirée par de la musique, plus particulièrement les productions de Papa Wemba », a rétorqué une jeune dame qui suivait également les quarts de finale du Chan opposant la Libye au Congo.        

Selon plusieurs psychologues, il y a plusieurs niveaux de la fan attitude. Cela peut aller de la simple reconnaissance du talent d’une personne admirée comme le font les adeptes, accros ou supporters de clubs de football, de chanteurs ou bandes de musique, jusqu’à une pathologie appelée érotomanie. Par définition, l’érotomanie ou syndrome de Clérambault désigne un délire qui se caractérise par la conviction chez un individu qu’il est aimé par un autre.

La psychothérapeute Aurore Le Moing estime que l’érotomanie « revêt une forme obsédante qui se fixe habituellement sur une personnalité publique ». « Cette attitude se traduit chez la personne érotomane par du harcèlement pour provoquer la rencontre avec la personne aimée et lui faire avouer ses prétendus sentiments », décrypte-elle.

Louanger quelqu’un ou l’aduler revient à s’identifier à la personne qu’on admire. Et les psychologues pensent que ce processus assez courant et classique qui peut intervenir dès l’adolescence, permet de s’identifier à d’autres modèles que ses parents et son entourage. Il participe ainsi à la construction de la personnalité en tant qu’individu à part entière.

Dès le début, le fait d’être fan n’est absolument pas dérangeant en soi, parce que le « groupie » pense croire seulement en la personne qui le fait rêver. « C’est un modèle qui nous aide à grandir et qui, en parallèle, nous fait rêver et nous apporte du bonheur. C’est en quelque sorte un pilier que l’on idéalise et qui peut se révéler un soutien quand on pourrait éventuellement en avoir besoin », explique Aurore Le Moing.

Les sociologues pensent qu’être fan n’est pas une mauvaise chose, même s’il peut générer des dangers. « Le vrai risque, quand on est fan, c’est de se centrer majoritairement voire uniquement sur l’aspect symbolique de ce qu’on admire et de se déconnecter de la réalité et de son environnement », nuance la psychologue. « On peut vivre à travers une personne ou idée, en régentant notre quotidien uniquement par rapport à elle. Auquel cas, on peut se retrouver isolé, se couper socialement de nos pairs et se conforter dans notre imaginaire. Cette attitude peut nous porter préjudice quant à nos relations amicales, familiales ou même de travail », conclut Aurore Le Moing. 

Faith Maeva Samba
Légendes et crédits photo : 
Le chanteur Wizkid saluant ses fans lors d'un concert
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